La mission d'Elisabeth
Il semble qu'Elisabeth ait eu l’intuition qu'elle allait remplir une véritable mission dans l'Eglise dans ses dernières semaines : moins de quinze jours avant sa mort, elle écrit à une jeune sœur partie à la fondation de Paray-le-Monial et sa lettre s'adresse aussi à nous aujourd'hui.
« Chère Soeur, je serai jalouse de la beauté de votre âme, car, vous le savez, mon petit coeur vous aime bien, et lorsqu'on aime on désire du bien à l'être aimé. Il me semble qu'au Ciel, ma mission sera d'attirer les âmes en les aidant à sortir d'elles pour adhérer à Dieu par un mouvement tout simple et tout amoureux, et de les garder en ce grand silence du dedans qui permet à Dieu de s'imprimer en elles, de les transformer en Lui-même. »
Lettre 335, octobre 1906
Elisabeth devient ainsi une amie pour ceux qui la rencontrent et qu’elle "attire" dans l’intimité de son Seigneur… A sa manière simple et chaleureuse, elle ouvre leur cœur à un Dieu tout proche qui les habite et se révèle comme "une immensité d’amour qui nous déborde de toutes parts". La Trinité cesse d’être un dogme un peu abstrait, réservé aux théologiens, mais devient le "grand Foyer d’amour" ouvert à tout chrétien de bonne volonté.
Le grand silence : écouter le Maître
Si son aide est affectueuse, elle est aussi énergique : nous avons à travailler pour sortir de nous-mêmes, nous quitter, nous perdre de vue, nous oublier... mais sans volontarisme.
« Quand je serai là-haut, voulez-vous me permettre de vous aider, de vous reprendre même, si je vois que vous ne donnez pas tout au Maître ? Et ce, parce que je vous aime ! Qu'Il vous garde toute sienne, toute fidèle en Lui je serai toujours toute vôtre. »
Lettre 333, octobre 1906
Ce mouvement est habité par l'amour et orienté vers l'amour.
« Si vous saviez combien mon âme est attachée à la vôtre, je dirai même combien j'ai d' "ambition pour elle" ! Je la voudrais toute délivrée, tout adhérente à ce Dieu qui l'aime d'un si grand amour !... Oui, je crois que le secret de la paix et du bonheur, c'est de s'oublier, de se désoccuper de soi-même... Puisque vous me permettez de vous parler comme à une sœur aimée, il me semble que le bon Dieu vous demande un abandon et une confiance sans limites... »
Lettre 249, novembre 1905
Elisabeth a choisi l'écoute toujours renouvelée de la voix de Jésus au mileu de tant d'autres voix, pour entendre ses appels quotidiens et décider d'aimer quoiqu'il arrive.
« Croyez que là-haut, dans le Foyer d'amour, je penserai activement à vous. Si vous voulez, je demanderai une grâce d'union, d'intimité avec le Maître ; c'est ce qui a fait de ma vie, je vous le confie, un Ciel anticipé : croire qu'un Etre qui s'appelle l'Amour habite en nous à tout instant du jour et de la nuit et qu'Il nous demande de vivre en société avec Lui... Cela élève l'âme au-dessus de ce qui passe, de ce qui broie, et la fait reposer dans la paix des enfants de Dieu. »
Lettre 330, octobre 1906
« Si vous saviez avec quelle certitude je comprends le plan de Dieu sur votre âme ; c'est comme dans une immense lumière qu'il m'apparaît et je comprends aussi que là-Haut je vais remplir à mon tour un sacerdoce sur votre âme. C'est l'Amour qui m'associe à son oeuvre en vous... la fidélité que le Maître vous demande, c'est de vous tenir en société avec l'Amour, c'est de vous écouler, de vous enraciner en cet Amour qui veut marquer votre âme du sceau de sa puissance, de sa grandeur. Vous ne serez jamais banale, si vous êtes éveillée en l'amour ! Mais aux heures où vous ne sentirez que l'écrasement, la lassitude, vous Lui plairez encore si vous êtes fidèle à croire qu'Il opère encore, qu'Il vous aime quand même, et plus même... Croyez son "porte-voix" et lisez ces lignes comme venant de Lui. »
Laisse-toi aimer
La transformation : ressembler à Jésus
Alors l'action de Dieu est libérée et il peut "s'imprimer" en nous. Pour Elisabeth qui a un sens tellement grand de la beauté de son Seigneur, ce qu'il imprime, c'est son image, sa ressemblance.
« Chère petite Soeur, sais-tu bien ta richesse ?
As-tu jamais sondé l'abîme de l'Amour ?
Je viens te révéler l'immuable tendresse
Qui plane sur ton âme et la nuit et le jour.
Par un regard tout simple, oh, que ta foi contemple
Le "Mystère caché" qui s'opère en ton coeur :
Voici que l'Esprit Saint te choisit pour son temple
Tu ne t'appartiens plus, et c'est là ta grandeur !
Sous sa touche divine, oh, demeure en silence
Pour qu'Il imprime en toi l'image du Sauveur.
Tu fus prédestinée à cette ressemblance
Par un mystérieux "décret" du Créateur... »
« Lorsque j'habiterai dans le Foyer d'amour.
Oui, je te couvrirai sans cesse de mes ailes
Et guiderai tes pas tout le long du chemin
Pour que jamais ton pied ne tremble et ne chancelle
Et puis pour qu'avec tout tu fasses du divin.
N'est-ce pas là, ma Soeur, la mission bien chère
Qui me fut confiée en un jour solennel. »
Poésie 106, juillet 1906
Elisabeth nous fait un merveilleux cadeau, elle nous offre en héritage son expérience profonde et personnelle pour que nous poursuivions son rêve là où Dieu nous appelle.
« Petite soeur, je serais heureuse d'aller là-haut pour être ton Ange. Comme je serais jalouse de la beauté de ton âme déjà tant aimée sur la terre ! Je te laisse ma dévotion pour les Trois, à l'Amour. Vis au-dedans avec Eux dans le ciel de ton âme ; le Père te couvrira de son ombre, mettant comme une nuée entre toi et les choses de la terre pour te garder toute sienne, Il te communiquera sa puissance pour que tu l'aimes d'un amour fort comme la mort ; le Verbe imprimera en ton âme comme en un cristal l'image de sa propre beauté, afin que tu sois pure de sa pureté, lumineuse de sa lumière ; l'Esprit Saint te transformera en une lyre mystérieuse qui, dans le silence, sous sa touche divine, produira un magnifique cantique à l'Amour ; alors tu seras "la louange de sa gloire", ce que j'avais rêvé d'être sur la terre. »
Lettre 269, avril 1906
"Cette contemplative, loin de s'isoler, a su communiquer à ses sœurs et à ses proches la richesse de son expérience mystique. Son message se répand aujourd'hui avec une force prophétique…", avait déclaré Jean-Paul II lors de la béatification en 1984. Aujourd’hui la canonisation ouvre de nouveaux espaces à sa mission, pour la Louange de Gloire des TROIS !