Elisabeth et Saint Paul
Passionnés du Christ Jésus
Cette confidence d’Elisabeth de la Trinité, trahissant des accents quasi pauliniens : « Voyez-vous, à son appel l’âme ne peut résister, Il captive, Il enchaîne, on ne s’appartient plus » (Lettre 171) ne pouvait que la rendre réceptive aux paroles de l’Apôtre saisi par le Christ, « à cause de lui j’ai accepté de tout perdre, […] ayant été saisi moi-même par le Christ Jésus » (Ph 3, 8.12). Le caractère passionné de Paul ne pouvait que séduire la jeune carmélite, elle-même éprise d’absolu et elle-même tout aussi enthousiaste que lui à faire connaître et aimer le Christ. N’est-ce pas pour communiquer ce trop grand amour qui l’envahit qu’elle se révèle à son tour grande épistolière ?
Vivre c’est le Christ
Cette sainte de l’intériorité est tout naturellement attirée par les expressions où s’exprime la relation intime de l’Apôtre au Christ, tel ce verset de la Lettre aux Philippiens « pour moi vivre c’est le Christ » (Ph 1, 21) ou encore « je vis, non plus moi, mais c’est le Christ qui vit en moi » (Gal 2, 20) qu’elle reprend pas moins de 25 fois ! Ainsi dans cette lettre adressée au chanoine Angles elle a cette expression, paulinienne s’il en est : « Que je ne sois plus moi mais Lui » (Lettre 294), exprimant ainsi son désir de configuration au Christ.
Un trop grand amour
Son expérience de l’amour miséricordieux de Dieu, un amour qu’elle voit infini, abyssal, « Je sens tant d’amour sur mon âme, c’est comme un Océan en lequel je me plonge, je me perds » (Lettre 177), la rend particulièrement réceptive à cette parole de la Lettre aux Ephésiens qu’une fois découverte, elle gardera sans cesse à ses lèvres : « A cause de son trop grand amour » (Ep 2, 4). Elle y reconnaît comme l’œuvre de Dieu en sa vie : « Oh, vois-tu, il y a un mot de saint Paul qui est comme un résumé de ma vie, et que l’on pourrait écrire sur chacun de ses instants : “Propter nimiam charitatem”. Oui, tous ces flots de grâces, c’est “parce qu’Il m’a trop aimée” » (Lettre 280 à sa mère). Et cet amour paternel de Dieu si débordant, que lui fait saisir le début de la Lettre aux Ephésiens, lui fait comprendre aussi sa propre vocation de louange de gloire (Ep 1, 12 cf. Lettre 220)
Être la maison de Dieu
Elle se réjouit aussi des passages pauliniens qui l’aident à saisir comment elle est de la maison de Dieu : « Vous n’êtes plus des hôtes ou des étrangers, mais vous êtes de la cité des saints et de la Maison de Dieu » (Ep 2, 19). Et Elisabeth de s’exclamer : « La Trinité, voilà notre demeure, notre chez nous, la maison paternelle d’où nous ne devons jamais sortir ! » (Le Ciel dans la Foi 2). Et à sa mère elle confie : « Pense, que ton âme est le temple de Dieu, c’est encore saint Paul qui le dit [1 Co 3, 16-17] ; à tout instant du jour et de la nuit les Trois Personnes divines demeurent en toi […] Alors, quand on sait cela, […] on n’est plus jamais seule ! » (Lettre 273).